Mardi 15 octobre, direction le Petit Bain à Paris pour une affiche sombre et intense. Au programme : Tenace, Maudits et Point Mort, ce dernier célébrant la sortie imminente de son nouvel album. J’étais venu, attiré par Point Mort que j’avais déjà vu sur scène au Planer’R Fest 2024, mais je ne m’attendais pas à prendre une telle claque du début à la fin à la fin. Trois groupes, trois univers puissants, et finalement une seule certitude en sortant : la scène française n’a vraiment rien à envier à personne.
TENACE

C’est Tenace qui a eu la tâche d’ouvrir cette soirée au Petit Bain. Le groupe, actif sur la scène post-hardcore française, a livré un set énergique et sincère, porté par une forte dimension émotionnelle.
Parmi les moments marquants, le morceau « Tout restera » a été dédié à un ami proche du groupe, tragiquement disparu en août dernier. Un hommage, dont les paroles « tout restera gravé là » ont résonné avec une intensité particulière dans la salle.
Malgré un récent changement de line-up, et l'absence de nouveaux titres, Tenace a su garder le cap avec des morceaux bien en place, une section rythmique solide et une énergie communicative. Le chant, très expressif, porte une vraie sincérité, bien que son timbre particulier ne parlera pas à tout le monde.
Avant de clôturer leur set avec « À cœur enchaîné », le groupe a tenu à remercier chaleureusement le public, Maudit et Point Mort. Visiblement heureux de remonter sur scène après une période compliquée, Tenace a su transmettre son envie d’aller de l’avant, avec déjà des projets annoncés pour 2026. Une belle entrée en matière pour une soirée placée sous le signe de l’intensité et de la résilience.




Maudits

La soirée se poursuit avec Maudits. Le groupe post-metal français en trio, s’est imposé avec une performance habitée, immersive et profondément marquante. Invités par Point Mort à partager la scène, ils ont offert un set qui a littéralement embarqué la péniche dans une traversée sonore à la fois puissante et introspective.
Formé depuis quelques années, Maudits cultive un univers à la croisée du post-metal, du sludge et du rock progressif, où la lourdeur des riffs côtoie des ambiances plus aériennes et contemplatives. Le groupe compte déjà plusieurs sorties à son actif, et s’apprête à dévoiler son prochain album d’ici un mois. Mardi, ils ont livré un set équilibré, naviguant à travers l’ensemble de leur discographie.
Dès les premières notes, l’immersion est totale. Aucun artifice, juste l’essentiel : des riffs lourds, tranchants, précis, portés par une section rythmique implacable. Le trio maîtrise ses instruments avec une aisance qui force le respect et plonge instantanément le public dans un état presque méditatif. Les compositions s’étirent, se déploient, avec des montées en tension maîtrisées, capables de happer l’auditeur sans le prévenir. Je pense parfois à Night Verses dans cette manière de conjuguer technicité et émotion brute.






Le public, compact et réceptif, répond présent. Ça headbang sans retenue, je sens que la musique de Maudits touche, au-delà du simple défoulement. Chacun semble absorbé, embarqué. Une courte prise de parole annonce la sortie de leur prochain album dans un mois. Sobre, efficace. Et ils enchaînent sur un dernier titre extrait de leur futur album.
Côté technique, rien à redire : le son a été irréprochable. L’ingé son mérite une mention spéciale pour avoir su rendre chaque nuance perceptible dans un set aussi dense. Chaque note, chaque frappe, chaque vibration était parfaitement intelligible, parfaitement dosée.
En résumé, Maudits a livré une prestation envoûtante, à la fois physique et introspective. Même pour celles et ceux qui ne les connaissaient pas, comme moi, c'est une excellente découverte. Un groupe à suivre de près, et un album à ne clairement pas manquer.

Point Mort

Tête d’affiche de cette soirée chargée en décibels, Point Mort a littéralement retourné le Petit Bain pour célébrer la sortie de son nouvel album. Le groupe, actif depuis plusieurs années sur la scène post-metal/hardcore française, s’est forgé une réputation solide grâce à un univers sonore dense et intense — et surtout grâce à des performances live qui ne laissent personne indemne.
On est unanime “Point Mort en live, c’est une claque.” C’est ce que j’avais retenu de leur passage au Planer’R Fest en 2024. Et c’est exactement ce qui s’est passé mardi soir.
La salle s’éteint totalement, le public réclame... Puis une lueur, une silhouette, la lumière s’allume : la chanteuse apparaît, le visage fermé, presque inquiétant. L’ambiance est pesante, tendue. Une courte intro, puis tout s’éteint à nouveau. Et là, d’un coup, la déflagration. La lumière jaillit, le son explose. Une claque auditive. Une montée en puissance fulgurante, directe, brutale. La foule est happée, le chaos peut commencer.



Sur scène, une déco travaillée : des fleurs disposées sur les pieds de micro et les amplis, contrastant avec la violence du son. Un choix esthétique marquant, qui participe à l’identité singulière du groupe. Car Point Mort, c’est aussi ça : une tension permanente entre beauté fragile et agressivité pure.
Dans la fosse, ça headbang sans relâche, porté par une énergie brute. Juste avant le titre "Point de non-retour", le groupe prend le temps de "s'auto" remercier pour l’organisation — un moment de respiration avant de replonger dans la tempête.
Le set s’est alterné entre passages frénétiques et instants de tension suspendue. Puis soudain : la scène s’adoucit, musique d'ambiance douce, les musiciens quittent la scène un à un, laissant place à un moment inattendu. Mais le public n’en a pas eu assez — les cris de rappel fusent.
Et les voilà de retour. La douceur n’aura été que temporaire. Le rappel est musclé, intense, viscéral. La chanteuse, habitée, incarne littéralement sa musique. Sa présence magnétique, sa voix tantôt hurlée, tantôt murmurée, finit de subjuguer une salle totalement conquise. Un set d’une maîtrise absolue, visuellement fort, musicalement percutant. Pour celles et ceux qui découvraient Point Mort ce soir là, l’effet est immédiat : on n’oubliera pas cette performance.




En quittant le Petit Bain, le bruit des amplis bourdonnait encore dans mes oreilles. Tenace, Maudits, Point Mort — chacun a laissé son empreinte d’une manière différente. Tenace a ouvert la soirée avec une sincérité désarmante, Maudits m’a happé dans un voyage sonore presque méditatif, et Point Mort a simplement tout renversé, entre rage et beauté.
C’était une soirée pleine de découvertes et surtout d’émotions vraies — ce genre de moment qui te rappelle pourquoi tu aimes tant la musique live.
Un grand merci à Guillaume Bernard (Klonosphere) pour l’invitation.
Report et photos : Stéphanie Morgado (@sekhmet_eve)
