8/9/2025

Ashen nous présente Chimera

Le 12 septembre marquera la sortie de Chimera, premier album très attendu d'Ashen. Un voyage musical très réussi, preuve supplémentaire du talent de la formation qui continue de conquérir un public toujours plus nombreux. Suivez-nous dans les coulisses de cet opus, avant de pouvoir enfin le découvrir dans quelques jours !

Le groupe est relativement récent mais il a fait quand même une grosse ascension assez rapide. Est-ce que c'est que du bonheur ou est-ce que c'est un petit peu quand même effrayant parfois ?

Clem

C'est que du bonheur.

Niels

Pour ma part, aussi.

Clem

Je ne pense pas qu'on puisse être effrayé par le chemin qu'on parcourt, d'une part parce que je trouve pas que ça aille si vite que ça. En vrai, on a respecté des étapes quand même assez communes. On a sorti des singles, puis un EP puis un album. On n'est pas arrivé nous avec un premier album et puis boom, tout de suite ! On a trimé et on trime encore énormément pour essayer de vivre de notre musique. Donc, on a le temps de le voir venir et du coup ça nous fait savourer aussi tous ces événements comme des choses qu'on a cherché à obtenir depuis pas mal d'années maintenant. Même si ça semble rapide et peut-être qu'effectivement… Je t'en remercie, c'est quand même dingue que tu nous dises ça en sachant que nous on pense l'inverse, ça montre à quel point on n'a vraiment pas la même vision des choses, et ça fait du bien d'avoir la vision des personnes qui voient ça de l'extérieur. Mais tu vois, chez nous là, je pense qu'on a envie presque que ça aille plus vite, sans pour autant que ça se passe comme ça [il claque des doigts]. Mais on a le temps de voir venir les choses et on a aussi le temps de les savourer. C'est un truc dont je me rappelle... Nicolas Delestrade, le bassiste de Novelists, nous avait dit une fois où on mangeait ensemble : « Les gars, appréciez le chemin parce que les années vont vite passer, et même si vous en chiez, il y a des fois où vous allez revoir un petit peu en arrière et vous allez vous dire, mon Dieu qu'est-ce que c'était bien ! ». Donc, c'est le kiff.

Tristan

Mais parce qu'aussi on n'a pas commencé en 2021, on s'est rencontrés bien avant et on était déjà à fond dans le projet trois ans avant de sortir des morceaux. C'est vrai que, pour nous, on a cette impression de longueur, parce que ça fait pratiquement 7-8 ans qu'on travaille au projet.

Niels

Sauf qu’en vrai, dans la réalité des choses, le groupe a réellement commencé à la première sortie de l’EP.

Tristan

Oui, mais c'est juste qu'on n'a pas les mêmes impressions par rapport à ça. Et puis t'as des gens aussi qui commencent à adhérer au projet que maintenant : donc ils ont l'impression que c'est tout nouveau pour eux, alors qu'en fait ça fait déjà 5-6 ans qu'on travaille activement dessus. Mais je comprends tout à fait ce que tu veux dire.

Niels

Pour autant, on a quand même l'impression que ça va vite depuis un an et demi mais pas au point où on a l'impression de monter dans un train en marche et que c'est incontrôlable. Au contraire, c'est un « bon vite », je pense.

Et les étapes qui pour vous ont eu le plus de signification dans ce qui s'est passé jusque-là ?

Antoine

En soi, les marches de l'escalier qu'on a monté depuis 4-5 ans, ont toutes eu une signification, mais les dernières en date, moi je trouve qu'il y a eu un gros step après la tournée Novelists de l'année dernière, la tournée Europe. L'écriture de l'album, bon ça c'est pas encore sorti publiquement, mais pour nous je pense que c'est une grosse étape aussi dans notre vie de musiciens, et puis pour les grosses dates, y a eu le Hellfest, il y a eu un avant et un après, je pense que c'est l'exemple le plus parlant de notre actualité.

Et donc là il y a la sortie de l'album, qui a été un tout petit peu décalée mais pas grand-chose non plus. Le décalage ça vous a frustrés, ou vous vous êtes dit : « Bon c'est pas très grave, ça fait pas un gros décalage ? »

Niels

Ça nous a frustré dans un premier temps, parce qu'on s'était tant tués les derniers mois dessus, on s'était mis cette deadline pour finir absolument coûte que coûte, enfin vraiment c'était une question de vie ou de mort, il fallait qu'on finisse à ce moment-là, et le truc c'est que finalement on a fini à temps, et ensuite c’était en mode : « Bon, en fait non, c'était une blague, ça sortira trois mois plus tard ! ». [Rires] Et donc, il y a eu ça qui nous a pris un petit peu de temps à digérer, pour autant maintenant on en est finalement contents, parce qu'au début l'idée c'était que ça sorte juste avant le Hellfest et maintenant qu'on a un peu de recul, eh bien on se rend compte que le fait que ça sorte après le Hellfest, après que beaucoup de gens nous aient découverts, c'est bien plus intéressant pour nous dans notre évolution.

Tristan

Ouais et on avait beaucoup moins de temps aussi pour le travailler, naturellement, c'était un peu : on le livre, on le donne au label...

Niels

Oui, d’un point de vue communication, parce qu'on a pas retravaillé l'album sinon depuis...

Tristan

Non non non, l'album, depuis qu'il a été donné au label on n'y a pas retouché mais par contre, effectivement, il y avait quand même une période très très courte entre le moment où on donnait l'album et le moment où il sortait normalement. Effectivement, du coup, quand on nous a annoncé ça, on était quand même très contents d'avoir trois mois de plus pour pouvoir travailler aussi tout un tas de choses qu'on avait peut-être déjà imaginées, mais qu'on ne pouvait pas mettre en place par manque de temps...

Antoine

Oui voilà, la frustration qu'on a ressentie suite à l'annonce du report, elle s'est vite transformée en opportunité de se dire :  « Parfait, c'est plus de temps pour le travailler, pour le promouvoir, pour savoir comment en parler et il n'y aura finalement que du bon à tirer de ça, quoi ». Ça crée un peu plus d'attente chez les gens qui le voulaient et même nous, pour les gens avec qui on voulait le partager, on avait hâte de leur faire écouter, mais bon c'est pour le mieux, on va dire ça.

Et donc, là, Chimera, comment vous avez choisi cette symbolique, cette thématique. D’où c’est venu ?

Clem

C'est un peu le fil rouge qu'il y a depuis l'écriture quasiment du premier morceau en fait.

Niels

Du premier ?

Clem

Ouais, ouais du premier. Les thèmes qui reviennent, c'est vraiment des thèmes très personnels, où on essaye de s'émanciper de ce qui nous freine à être qui on voudrait être, parce qu'on a peur du regard des autres, parce qu'on n'a pas résolu des conflits intérieurs avec des personnes proches de nous, il s'est passé des traumatismes dans nos vies qui nous déforment… Et en fait, je pense que notre musique a pour vocation de faire voyager les gens au travers de ces questions qu'on se pose, sur qui nous sommes et comment est-ce qu'on parvient en fait à s'émanciper de ces choses qui nous bloquent. Et vu qu'on trouve ça plaisant d’écrire la musique comme ça, on s'est dit qu'il fallait qu'on embarque l’auditeur dans ce voyage-là. Et Chimera, en fait, si tu veux, c'est cette personnification de cet idéal qu'on voudrait être, qui nous aide un peu comme un narrateur, à passer ces étapes-là pour à la fin être devenu ce "Chimera". Un petit peu comme si on pouvait invoquer un héros badass qui était notre miroir idéal, et en fait ce miroir idéal ça reste quand même un individu qui a vécu des choses difficiles mais qui est parvenu à s'émanciper de ces choses-là pour plus en être l'esclave. Et cet album raconte ce voyage intérieur là, si tu veux.

C'est bien que tu utilises les mots « voyage » et « narrateur », parce que justement, moi j'ai adoré l'album en soi, mais un des trucs qui m'a plu - à part les morceaux que je trouve vraiment cool - j'ai adoré le fait qu'il y ait une vraie structure, un vrai fil narratif. Il y a l'intro, il y a l'interlude etc., le dernier morceau fait vraiment dernier morceau. C'était important pour vous qu'il y ait vraiment ce côté comme un livre, comme une histoire…

Niels

Oui ! C'est un truc… Je pense qu'on partage tous beaucoup d'amour pour des albums qui ont un concept et qui ont une histoire qui relie les morceaux entre eux, et on avait pas trop envie de faire de cet album un ensemble de morceaux qui n'ont pas trop de rapport entre eux. De par notre manière de travailler et cet attrait qu'on a pour le world building et le fait créer des univers, ce qu'on faisait au début pour chaque morceau, là on voulait le faire pour un album, et c'est ce qui nous a fait choisir certaines sonorités, certains petits sons qui sont dans les ambiances. Ça va même dans la composition, les couleurs utilisées, pour avoir cette espèce d'ambiance toujours un petit peu menaçante avec des fois des choses qui pourraient rappeler l'enfance avec des petites baises, des trucs comme ça de temps en temps…

Clem

Des petites quoi ???

Niels

Baisses.

Clem

J'ai entendu des petites baises.

Antoine

Moi aussi j'ai entendu des petites baises ! [Rires généraux]

Après, moi j'avais pas remarqué ça dans l'album ! [Rires]

Clem

On a enregistré des petites baises par-ci par-là…

Tristan

Y a des éléments cachés ! [Rires].

Antoine

C'est vrai que l'album, de par l'ordre des morceaux autant que par son contenu, par ce qu'il raconte, c'est un voyage de A à Z dans sa construction, et tel qu'il est composé.

Niels

Du coup, je disais qu'on avait essayé de créer un peu un paysage sonore pour l'album, et pour répondre à ta question, c'était quelque chose qu'on avait à cœur, et si toi tu as ressenti cette continuité comme on voulait que les gens la ressentent, c'est super !

En plus ça m'a rappelé des albums plus anciens qui cherchaient souvent à avoir une vraie structure et pas juste un collage de morceaux, et ça c'est super agréable parce que quand on l'écoute d'une traite on est vraiment dedans. L'album est super varié, il y a plein d'influences qui se rejoignent, comment vous vous y prenez tous ensemble pour amalgamer tout ça et pour en faire quelque chose de cohérent ?

Niels

C'est pas facile ! [Rires] Vous voulez répondre ?

Tristan

Bon, je peux commencer, mais je laisserai Niels parler, parce que c'est lui qui confectionne tout ça avec ses petites mains, ou peut-être ses grandes mains, d’ailleurs ! Je pense que c'est déjà quelque chose qu'on avait l'habitude de faire avant. Avant l'album, il y a eu un EP, qui était déjà assez varié, je pense que c'était un exercice qu'on avait déjà travaillé avant. Et le fait après de déboucher sur la production d'un album, je pense que ça a quand même facilité le fait de travailler des mélanges et de faire des morceaux hybrides, parce qu'on l'avait déjà fait. Incorporer des éléments électroniques dans des morceaux, on avait déjà fait, faire rapper Clément, je pense qu'on l'avait déjà fait, en tout cas dans des flows, pas forcément sur du tonal. Non ? Ah non, c'est vrai que ça arrive sur Chimera, ça. Mais tout ça pour dire que c'était déjà des expérimentations qu'on avait faites avant, maintenant c'est sûr qu'on a quand même monté d'un cran…

Niels

De bizzarerie !

Tristan

Oui ! …sur tout ce qui constitue l'album. Et c'est quand même un sacré défi.

Niels

Et à la question comment faire pour réussir à faire fonctionner tout ça, je te dirais que, déjà, d'essayer de faire en sorte que le tout soit contenu dans un univers qui est à peu près cohérent avec lui-même dans les choix de sons utilisés, dans les textures… Par exemple, il y a un passage qui en vrai est de la techno, ce passage-là, à la fin d’'Oblivion'", on s'est dit que pour que ça puisse fonctionner avec le reste de l'album, il fallait qu'on emprunte les codes qu'on voulait emprunter au style, mais pas tous. Et pas passer directement dans une espèce de caricature de ce style. Et on s'est dit : « Voilà ce qu'on va prendre, mais essayons de garder certains codes du metal et de notre manière de faire les choses ». Et c'est pourquoi on a beaucoup de recherche sur la texture de chaque son utilisé, pour que la transition d'un style à un autre, ça choque pas, et que d'un point de vue au moins sonique et auditif, on reste dans le même univers sonore.

Clem

C'est ça, il y a un truc qui est un gros piège lorsqu'on produit de la musique électronique sur un instrumental standard rock, l'orchestration rock avec batterie, basse, guitare, c'est qu'il faut jamais jamais jamais que le sample frappe plus fort que ce qui est joué avant ou après. Sinon ça floppe. Et c'est des trucs tout bêtes, mais si on fait en sorte que, mettons, le kick acoustique, selon comment il est mixé, puisse sonner de façon fluide, c'est plus facile d'incorporer ce genre d'éléments, et c'est quelque chose qu'on avait déjà expérimenté bien avant. Si tu prends "Sapiens", "Nowhere", etc., c'était déjà des batteries électroniques, on avait déjà commencé à les incorporer plus tôt. Et ce qu'on a juste fait, c'est qu'on a rendu le truc encore plus extrême, on a juste allé encore plus loin.

Vous parliez d'"Oblivion", et on va en reparler un peu après, ce qui est aussi super intéressant, je trouve, c'est qu'il y a plein de morceaux qui ont une évolution vraiment bien amenée, par exemple "Desire", mais y en a plein d’autres, et il y a aussi "Clone of a Clone" qui alterne des passages très doux et des passages beaucoup plus agressifs, mais tout ça est fait de manière super fluide. Quand vous composez le morceau en amont, est-ce que vous avez une idée de départ vraiment précise ou est-ce que vous tâtonnez beaucoup ?

Niels

C'est variable, il y a des morceaux où on se dit : on veut faire un morceau qui aura cette structure, et il y a des morceaux où on se dit : on veut faire un morceau qui aura cette atmosphère, et la structure se fait un peu toute seule.

Clem

Ce qui va changer le visage d'un morceau qu'on avait imaginé, c'est aussi ce qu'on va trouver à la voix, les toplines, et à quel point on va arriver à rajouter l'orchestre rock metal facilement dans la compo. Parce que la compo, elle vient très souvent d'une production plus électronique, avec des beats plus pop, aussi bien dans les instruments que dans les structures, et c'est après qu'on rajoute l'instrumentalisation rock metal. Et en fait, c'est souvent quand on rajoute ce truc-là, qu'on se dit : ok l'idée de base peut-être qu'elle va pas fonctionner, peut-être qu'on peut se permettre d'aller rajouter un breakdown bien dégueulasse à cet endroit-là, alors qu'au départ on y avait pas pensé, et puis après les toplines viennent par-dessus et viennent aussi réinspirer l'instrumental. L'instrumental rechange parce qu'on a trouvé des voix dessus, en fait c'est un tour de passe-passe, de ping-pong, qui n'a pas de règle parce que c'est l'inspiration qui prime.

Niels

Et je dirais que c'est toujours un équilibre à constamment trouver entre réussir à garder l'idée de départ pour aller jusqu'au résultat qu'on voulait, et en même temps lâcher du lest et laisser un peu la magie de la composition se faire pour finir le morceau. Et c'est toujours ce truc, il faut limite un peu faire en sorte que ça se laisse faire tout seul, je pense, pour que ça soit logique et cohérent et pas déformé par une vision idéalisée qui n'était que quelque chose de très flou au départ de la création.

Comme j'ai dit, j'ai adoré l'album, il y a vraiment une tonne de morceaux incroyables, mais si je devais en choisir un je pense que ce serait "Oblivion"…

[Éclats de rires généraux]

Antoine

Tout le monde nous a dit ça !

Clem

Mais what the fuck ?!

Antoine

Mais en fait tant mieux parce que j'adore ce morceau et ça conforte le fait que le choix d'un parti pris fort peut justement être... Non, mais du coup c'est cool que tu nous dises ça, parce que ça a l'air d'être un sentiment partagé, et on voit à travers ces retours-là, que le choix de faire un morceau avec une identité très prononcée, avec des partis pris assez forts, peut plaire tout autant, là où nous on doutait de se dire est-ce que c'est un bon choix, est-ce que c'est pas trop risqué, etc. Et pour le cœur du morceau, sans parler de sa structure qui est quand même très particulière, c'est un morceau que personnellement j'adore parce que la tension ne fait que monter. On va de surprise en surprise, il y a un solo de guitare là où on l'attend pas forcément…

Niels, à Antoine

Le tiens, pour ne pas le dire…

Antoine

Et qui est de moi, oui, merci ! [Rires] Et le fait que ça se termine en techno comme ça, ça crée la surprise.

C'est vrai que je ne m'attendais pas du tout à cette fin, et tout du long, l’atmosphère était très intéressante. Mais du coup, si vous ne deviez choisir qu’on morceau de l’album, ce serait lequel ?

Niels

Pour moi ce serait dans le sens de "Living in Reverse" et "Clone of a Clone", je pense.

Clem

C'est un peu difficile parce que je t'avoue que j'ai une connexion émotionnelle avec quasiment tous les morceaux de manière assez intense, mais un peu plus avec "Meet Again" et "Living in Reverse".

Niels

Ça dépend des jours ?

Clem

C’est pas que ça dépend des jours, ça dépend des contextes. Quand il s'agit de faire un concert, savoir qu'on va jouer "Chimera", "Crystal Tears" et "Cover Me Red", ça m'enjaille très fort aussi. Je dirais qu'il y a des contextes pour lesquels je me sens plus connecté avec tel morceau qu'avec un autre. On a la chance d'écrire une musique qui nous oblige presque à s'investir émotionnellement dans la prestation, et même dans l'écriture, dans l'enregistrement. Je t'avoue que c'est difficile de choisir un morceau plus qu'un autre.

Et pour les live, est-ce qu'il y en a un que vous redoutez de jouer ?

Niels

Qu'on redoute ?

Clem

Pas pour des raisons d'exécution.

Niels

Oui, plus pour ce que ça représente de chanter ça. Absolument. Du coup, "Living in Reverse", il y a quelques phrases qui ont pris un autre sens depuis l'écriture du morceau. Je ne sais pas si tu veux t'étaler dessus, Clem, ou pas trop.

Clem

Disons que c'est un morceau qui a toujours eu un double sens de lecture, je trouve, qui a été écrit à la fois pour nous et à la fois pour nos fans, l'auditeur, en général, pour donner une touche d'enthousiasme dans ce chemin qui consiste à s'émanciper, se trouver en tant que personne. Mais il y a des références personnelles, notamment à ma chienne Hestia, qui au moment où ce morceau a été écrit, était encore vivante, et où j'avais déjà cette peur énorme de la voir partir. Sauf que depuis, elle est partie. On est un groupe qui est très soudé, qui se connaît très bien, et dans lequel malheureusement nous avons tous vécu des deuils très durs, et souvent à des jeunes âges. Et je pense que c'est un morceau qui va nous faire nous connecter les uns avec les autres de manière assez particulière quand on va le jouer en live.

Donc plus pour le côté de la charge émotionnelle que ça représente, pas pour des raisons du style c'est un peu casse-gueule en live...

Niels

D'un point de vue technique, non pas trop. On a plus hâte qu'autre chose. Il y a des morceaux où forcément, ça nous donne envie de réadapter certaines choses pour que ça puisse fonctionner comme on le souhaite en live. Mais on travaillait encore là-dessus hier soir et il y a plein de choses qu’on a très hâte de faire en live.

Clem

C'est ça, on est plutôt des « tryharders » en vérité. On se met au défi plus qu'autre chose. C'est-à-dire que quand il y a un truc qui n'est pas facile à faire, on va faire en sorte que ça le soit. Donc si tu veux, on n'a pas trop peur. C'est plus de l'excitation de voir quand est-ce qu'on va y arriver.

Niels

Le solo de "Meet Again" me fait peur [Clem éclate de rire] parce qu'il est vraiment très dur à jouer. Voilà, tu as ta réponse.

Clem

Oui, j’avoue !

Concernant vos live récemment, il y a eu le Hellfest, il y a eu aussi la première partie de Papa Roach, ce sont quand même de grosses dates. Quand vous vous préparez à des live comme ça, est-ce que vous faites certaines choses un peu différemment de d’habitude ?

Tristan

Je pense que c’est toujours un peu la même chose. On nous a posé cette question pour le Hellfest, et en fait, t'as juste une pression supplémentaire, parce que tu sais que tu joues pas devant 200 personnes, mais 25 000. Donc si tu te loupes, ça sera devant 25 000 personnes, pas 200, et faire oublier ça à 25 000 personnes, c'est plus compliqué qu'à 200 personnes, évidemment. Mais sinon, dans la préparation, c'est la même chose, franchement. C'est vrai qu'on travaille aussi beaucoup en amont des concerts, on a toujours ces rituels ensemble hebdomadaires, on se voit deux fois par semaine, selon les périodes évidemment, hein ! Quand on est en full création d'album, on lâche un peu de lest sur les répétitions, mais en vrai, on ne privilégie pas certaines préparations de tels concerts, parce que ce sera un énorme concert. Je pense qu'on les aborde plus ou moins toujours de la même manière, juste une petite pression supplémentaire quand c'est un gros truc que t'as encore jamais fait, mais sinon dans la préparation je pense que c'est un peu similaire.

Clem

Je pense qu'il n'y a jamais aucun concert qu’on ait négligé de notre vie. On a la chance d'apprécier le chemin, comme je disais tout à l'heure, et pour nous chaque date a de la valeur. Quand on était en tournée européenne avec Novelists l'année dernière, on a fait des dates où on jouait pour vraiment 30 personnes.

Antoine

Voire moins que ça.

Clem

Et il y a des fois où on se disait : on n'a jamais aussi bien joué que là. Parce qu'on joue aussi pour nous, et même si des fois il y a des dates qui nous mettent grave la pression, on a juste envie de jouer le mieux possible, parce qu'on est comme ça. On ne pourrait pas se regarder et se dire, les gars on répète une demi-heure et puis on enchaîne, on part en tournée, no way. On a besoin de répéter pour être bons, on a besoin d'être bons pour se sentir bien. Donc j'espère que ça portera ses fruits, mais Ashen est un groupe live, et un groupe live, c’est un groupe qui répète.

Et là il y a la tournée qui se passe super bien, il y a plein de dates sold out, etc.

Clem

Oui, et on a des nouveaux sold out, à annoncer, par exemple, Nantes, c’est fini !

Est-ce que ça vous donne envie, comme je sais que l'univers visuel est vraiment important aussi... Est-ce que sur scène aussi, vous pourriez envisager sur des tournées avec plus de moyens, de rajouter des éléments visuels ?

Niels

On aimerait vraiment beaucoup. Comme tu l'as dit dans ta question, évidemment c'est les moyens actuellement qui nous freinent, et c'est normal au stade où on est. Mais la boîte à idées sur les choses à faire en live est infinie. Et on a vraiment hâte d'arriver à ce stade où on pourra proposer ce genre de choses.

Est-ce que vous avez assisté à des concerts que vous avez considérés comme le concert « parfait » et où vous vous êtes dit : « voilà, c’est ça l’objectif à atteindre » ?

Niels

En termes de ce qui se passe autour du concert, donc en termes de scéno, etc., en termes de la mise en valeur du concert, tu parles ? Ou plus de l'émotion ?

Tout ça à la fois.

Niels

Moi, il y avait Yungblud au Zenith qui m'avait vachement marqué par ce sentiment de communion qu'il y avait tout le long du concert dans la salle entre les gens. Je trouvais que c'était vraiment très très fort et ça m'avait beaucoup inspiré. D'un point de vue scénographie, en vrai, il y a forcément Bring Me [The Horizon] à Bercy qui était énorme de par les moyens de production et tout le décor qu'ils avaient imaginé, qui était vraiment incroyable. Sinon, je passe la parole à Clément. Tu as peut-être des idées ?

Clem

Moi, je dirais que l'artiste qui m'inspire le plus pour le live, dans la conception d'un show et de ce que je pense qu'Ashen pourrait proposer si on a la carrière, le public et les moyens, c'est les shows de The 1975. Parce que je trouve que c'est peut-être le groupe sur lequel je me dis : là, j'ai enfin le menu de restaurant rêvé. Il y a la scénographie qui est très éloignée des écrans et je t'avoue que moi, les écrans, ce n'est pas un truc qui me fait tant kiffer que ça, dans le sens où ça n'apporte pas… il n'y a pas le touché, tu vois. Il peut y avoir certainement des choses extraordinaires qui sont montrées avec des trompe-l'œil, que je trouve absolument dingues. Comme pour la réf donnée par Niels de BMTH à Bercy qui pour le coup, est le groupe qui utilise le mieux les écrans que je connaisse, ça c'est sûr. Mais je pense qu'Ashen, ça ne va pas aller dans cette direction si on a les moyens, dans le sens où on a ce besoin, je dirais, peut-être plus théâtral. Ce n'est pas un terme qui d'habitude convient à Ashen, mais pour ce qui est du live show, je pense que si. Parce que ce qu'a fait The 1975 avec justement ce show où c'est des décors en dur, il y a un fil rouge narratif où ils évoluent d'une pièce à l'autre, que chaque musicien a sa place à lui et en même temps appartient au décor… En fait, il y a un mélange entre le décor et les musiciens que je trouve extraordinaire et qui m'inspire énormément.

Niels

On a un peu ce ressenti avec les écrans qu'il y a souvent ce truc un peu... Limite, ça peut un peu distraire de ce qui se passe sur scène. Là où créer un décor sur scène vraiment en dur avec une vraie scénographie telle qu'on l'entend, selon nous, ça apporte un truc en plus.

En termes de vidéos, vous avez sorti quand même proportionnellement beaucoup de vidéos par rapport au nombre d'albums que vous avez jusque-là. C'est des vidéos en plus ambitieuses et soignées, on sent qu’elles ont été faites par choix et pas par contrainte. Est-ce que vous avez déjà eu pour idée que peut-être vous pourriez faire une sorte de court-métrage, un album qui soit vraiment accompagné totalement par une vidéo qui aille d'un point A à un point B ?

Niels

Par notre manière de fonctionner et de travailler sur les derniers singles jusqu'à présent, ce n'était pas trop possible. Pour autant, on a quand même des liens, un fil rouge entre les derniers clips. Mais vraiment faire comme un court-métrage, c'est typiquement le genre de choses qu'on rêve de faire un jour.

Clem

Ouais, totalement. Quand Knocked Loose avait sorti leur court-métrage en animation, où tu avais littéralement tout l'EP qui était donné dans un court-métrage, c'est vrai que c'était vraiment très inspirant. La narration est quelque chose qui nous a toujours attirés. Ça pourrait être un truc qui arrive dans les prochaines années, mais comme disait Niels, je pense qu'il faut le projet pour que ça puisse se réaliser.

Mais c'est une idée qui pourrait vous plaire.

Clem

Oui, carrément.

Au niveau des thématiques, vous êtes quand même sur des thématiques assez sombres, on va dire. Est-ce que vous pensez que pour le futur, vous pourriez partir sur des trucs un petit peu plus légers sans forcément vous mettre à faire du Trollfest ou un truc qui n’a rien à voir? [Niels rigole] Ou est-ce que c'est vraiment par ce genre d'émotions que vous exprimez le mieux ?

Clem

Je sais qu'on est tous très différents dans Ashen et dans notre manière d'exprimer nos émotions. Ça, c'est indéniable. La seule contrainte qu'il y a, c'est que sachant que je suis l'interprète principale des morceaux d'Ashen et que la manière que j'ai de vivre mes émotions, c'est très souvent dans l'intensité et ce qui, moi, me fait vibrer artistiquement, c'est quand même les expressions viscérales des émotions, plutôt que d'y aller dans une nuance légère et onirique, je pense qu'on aura toujours cette intensité dans l'interprétation et dans à quel point on peut avoir l'impression que l'interprète est au bord du gouffre. Je trouve que quand un interprète est capable de donner des émotions où on sent que... [Il s’interrompt un instant, car il vient de recevoir une notification annonçant une très bonne nouvelle pour le groupe !*] Les interprètes qui me touchent, ce sont ceux qui vident leurs tripes, peu importe comment ils le font. Mais on sent que l'interprète est à fleur de peau, parce que c’est réellement le cas. Il y a une forme d'authenticité et de puissance qui se dégage de ces interprètes-là, qui est assez indéniable. C'est-à-dire qu'on ne peut pas chanter avec autant de personnalité, avec autant d'authenticité, si ce que tu racontes ça ne vient pas de toi. Très souvent, ces artistes-là... Vu que ces artistes m'inspirent énormément, je pense que l'interprétation d'Ashen est aussi inspirée par ça, qu'on le veuille ou non. Mais tu vois, l'album, par exemple, typiquement, même s'il y a ce côté très viscéral, très intense, très dramatique, il y a aussi des morceaux qui viennent nuancer, contrebalancer, parce qu'on aime cette nuance, cet équilibre entre le noir et le blanc, entre les morceaux très calmes, très tristes, certes, mais avec un double sens qui vient contrebalancer, et les morceaux, justement, au contraire, rentrent dedans très viscéraux, mais où il y aura toujours de l'émotion aussi intensément racontée, je pense.

Niels

Je pense qu'il y a... Une chose est sûre, c'est qu'on aspirera toujours à faire quelque chose d'intense et de sensible. Et peu importe où on va en termes d'émotion, je pense que cette recherche nous fait toujours avoir quelque chose où il y a de la tristesse dedans, mais pas seulement. Il peut aussi y avoir beaucoup d'espoir, et ça peut être justement cette dualité sur laquelle on fonctionne.

Le nom du groupe renvoie aux cendres. Je suppose que vous êtes au courant qu'il y a un jeu vidéo qui porte le même nom.

Niels et Clem

Bien sûr, oui.

Est-ce que vous êtes fan de jeux vidéo ? Est-ce que vous verriez composer de la musique pour des jeux vidéo ?

Clem

Totalement.

Niels

Il y a un côté un peu plus cinématique que vraiment jeu vidéo, je dirais, dans l'album. Mais c'est aussi ce genre de musique qui peut nous inspirer et qui nous a déjà inspirés. Donc clairement, c'est quelque chose qu'on adorerait faire. On peut citer un artiste, Woodkid, qui est une grosse inspiration pour nous, et qui a fait beaucoup de musiques pour le dernier Death Stranding, par exemple. Donc vraiment, c'est typiquement ce qu'on aimerait faire un jour à côté, comme side project.

Clem

Pour te donner un ordre d'idée, ce qui est assez rigolo, c'est que ma copine, y a de ça deux jours, m'a dit, quand elle réécoutait l'album : « c'est marrant, "Oblivion", pour moi, ça pourrait être une BO d'Arcane ». Et en fait, j'y avais pas pensé, et quand j'ai réécouté le morceau, j'ai compris complètement pourquoi : il y a ce côté très hybride qu'il y a dans la BO d'Arcane. Mais pour revenir au jeu vidéo...

Niels

Y a une ambiance K-pop aussi…

Clem

Exactement, c'est exactement ça. Mais pour revenir au jeu vidéo, esthétiquement, on a été quand même pas mal inspirés par Final Fantasy, Devil May Cry et Elden Ring, pour ne citer qu'eux, dans certains détails de la direction artistique de certains clips. Et donc, même dans l'élaboration du personnage de "Chimera", ce qui fait que c'est vrai que le jeu vidéo, culturellement, nous inspire pas mal. Qu'on soit joueurs hardcore ou pas du tout, même, d'ailleurs.

Et donc, vous, ce serait plutôt pour quel type de jeu ?

Niels

Pour moi, un truc fantaisiste.

Clem

Ah ouais, complètement.

Niels

Moi, je joue à extrêmement peu de jeux, très très rarement, donc je connais pas tous les termes et tout ça, Clem les aura.

Clem

Moi, je pense que j'aimerais beaucoup faire un son pour Devil May Cry, juste parce que je pense que ça pourrait grave coller.

Niels

Mais le type de jeu, ça serait quoi ? Ça serait un Dark Souls ?

Clem

Non, ça serait pas un Souls-like. Ça dépend de l'univers, je dirais. Ça pourrait être action-aventure, ouais, solo narratif, parce que les jeux solo narratifs permettent aussi de pouvoir incorporer ce genre de son. Je parle de Devil May Cry, mais c'est un beat'em all, donc voilà. L'action solo narratif, ça pourrait être un kiff infini.

Niels

Je suis d’accord avec ça !

Bon eh bien on va terminer là-dessus, et puis de mon côté on se voit à la Maroquinerie [le 10 octobre 2025, il reste quelques places, mais plus beaucoup, profitez-en rapidement !].

Clem

Carrément.

Et d'ici là, profitez bien, et célébrez la bonne nouvelle !

Niels

Merci beaucoup ! Bonne journée !

Clem

À très bientôt !

Orsola G.

*Nous étions tenus au secret jusque-là mais l'annonce a depuis été faite de manière officielle : Ashen fera la première partie de Three Days Grace au Bataclan en décembre prochain ! Une nouvelle qui les a bien entendu beaucoup émus, en particulier Clem, grand admirateur d'Adam Gontier !

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