Deux ans après Dance Devil Dance, les suédois d'Avatar sont déjà de retour sous la lumière des projecteurs, ou plutôt, dans la pénombre de la forêt. Monstres de cirque moderne et musiciens hors pairs, leur cirque infernal a déjà fait le tour du monde et s'est imposé comme véritable référence du genre (inqualifiable, au demeurant). Leur dernière proposition s'était révélée profondément plus expérimentale et risquée, et quelque chose nous dit que la vapeur ne s'est pas inversée avec Don't Go In The Forest. Alors, prêts à transgresser les règles et à vous engager dans les bois avec nous ? Un 31 octobre ?
Après vous.

Connaissez-vous le Boléro de Ravel ? Mais si, cette ritournelle presque militaire rythmée par les percussions… Eh bien sachez qu’Avatar a décidé de nous en proposer une nouvelle déclinaison avec « Tonight We Must Be Warriors ». Un titre qui nous plonge tête la première dans l’univers barré et imprévisible d’Avatar. La batterie est omniprésente et donne le ton d’un morceau qui est tout simplement inqualifiable. Le chant ressemble plus à un appel au rassemblement d’un capitaine qu’à une tirade mélodique, qui serait davantage tenue par la guitare.
Sans transition aucune, « In The Airwaves » s’enfonce dans les facettes les plus sombres d’Avatar. Un rythme qui tire sur le death sans aucune gène, un chant saturé et un refrain catchy, on y reconnaît moins la patte des suédois, mais on prend une sacrée claque (dans la nuque).
Les gars d’Avatar sont connus pour une chose parmi d’autres : ils sont absolument imprévisibles. Alors, les entendre dérouler un morceau perdu quelque part entre le power metal, Alestorm et Windrose, finalement, ça n’étonne personne. « Captain Goat » nous propulse ainsi dans les terres arides et sauvages d’une Suède torturée, dans une quête épique et combien importante (enfin, on l’imagine comme ça).
« Don’t Go In The Forest est peut-être le morceau le plus proche de l’ADN d’Avatar. Surtout par contraste à « Death Glitz », un titre disco pop tourmenté et franchement perturbant qui nous prouve une nouvelle fois à quel point Avatar est imprévisible. Et ce ne sont pas les riffs et la voix inquiétants de Johannes Eckerström sur « Abduction Song » qui nous prouveront le contraire… Si bien qu'on est presque pris au dépourvu face à la douce « Howling At The Waves ». Elle nous rappelle fortement l'oeuvre d'un certain compatriote, le bien nommé Tobias Forge, et détonne par son classicisme.
Oh, fans de Dance Devil Dance, vous ne devriez pas être indifférents à « Dead and Gone and Back Again » (tout un programme) et à la voix sensuelle et pénétrante d'Eckerström. Et fans de la première heure, de l'ère d'Avatar Country et autres Feathers & Flesh, ce morceau vous évoquera sans doute un écho lointain, celui de « The Eagle has Landed. Savant mélange de black, de death et de cette pincée de je ne sais quoi qui fait d'Avatar ce qu'il est, on dévore ce morceau sans en laisser une miette.
Il est déjà l'heure de quitter la forêt. Quand « Take This Heart and Burn It » joue les BPM, « Magic Lantern » éclaire le bout du sentier en douceur. Comme une note d'espoir, c'est un titre lumineux (du moins, la plupart du temps) qui signale la fin du voyage.
Soyons clairs, il faut être bien accroché pour s'engager dans la forêt en compagnie d'Eckerström et sa bande. Ce n'est pas un album facile, ni abordable, mais bien une proposition qui parlera d'avantage aux initiés qui savent lire entre les lignes d'Avatar et qui, riches d'une expérience qui se compte à présent en décennies, sauront apprécier la complexité des morceaux. Alors, en fans de longue date, on décèle dans cet album la volonté de dévoiler encore plus ce qu'est Avatar à travers un prisme résolument différent, comme une expérience de sortie de corps, une interprétation de ce qu'est Avatar à travers les yeux d'autrui.
Tout un programme, certes, mais un album qui s'inscrit dans la construction d'une identité complexe et aussi perturbée que géniale.
Annaëlle MOSS
