Genre : Metalcore / Rap / Post-hardcore
Pays : Etats-Unis
Label : Epitaph Records
Sortie : 16 août 2024
Note finale : 3/5
Falling In Reverse a démontré une évolution exceptionnelle ces dernières années, suivant l’évolution personnelle de son charismatique et non moins tourmenté frontman, Ronnie Radke.
Il est donc important de comprendre l’histoire de cet homme pour apprécier les contours de son œuvre à sa juste valeur. Ronnie Radke n’est pas un enfant de cœur, loin de là. Enfance difficile, abandon maternel, pauvreté, autant de chemins tortueux par lesquels un enfant ne devrait pas avoir à passer, néanmoins, c’est ainsi que démarre la vie du chanteur. En 2004, il forme Escape The Fate, et rapidement, la formation rencontre un succès international. Vous n’avez pas pu passer à côté si vous avez grandi dans les années 2000 avec des hits tels que Situations ou My Apocalypse. Cependant, la sortie de cet album marque l’expulsion de Ronnie Radke du groupe, ce dernier étant impliqué dans un assassinat. C’est le début de la déchéance du feu-chanteur. Dépendance à la drogue, emprisonnement, violation de conditionnelle, retour à la case prison… depuis laquelle Ronnie écrit. Ces mélodies, elles verront le jour sous la bannière de Falling In Reverse au cours de l’année 2011 avec la sortie de l’album The Drug In Me Is You. Cette nouvelle formation n’est pas la sœur d’Escape The Fate mais on devine qu’on a plutôt affaire à un reflet des influences de Ronnie Radke et de son parcours. Titres coups de poing, très personnels aux influences variées allant du rap au dubstep en passant tout de même par le metalcore et le post-hardcore… Falling In Reverse est un livre ouvert sur ce qui se passe dans la tête de l’homme qui a décidé de prendre un nouveau départ. On y est également témoin de l’avènement d’un chanteur extrêmement talentueux qui a le courage d’afficher un parcours chaotique et de s’affranchir des « qu’en dira-t-on ». La formation est en évolution constante, en démontrent les reprises des titres phares du groupe « The Drug In Me Is You »et « I’m Not A Vampire » en versions réimaginées. Des véritables symboles d’une recherche de profondeur, de sens, et quelque part aussi, d’apaisement. Vous l’aurez compris, Falling In Reverse, c’est tout un programme, et tout un monde qu’on vous encourage vivement à visiter, et dans l’ordre chronologique, histoire de s’imprégner de cette évolution magistrale.
Bon, ceci étant dit, intéressons-nous à cette nouvelle production, Popular Monster. Ce nom ne vous est peut-être pas inconnu puisque le titre du même nom est sorti il y a déjà… 4 ans.
« Prequel » porte parfaitement son nom. Ce titre s’illustre par sa capacité à planter le décor d’un album qui s’annonce à mi-chemin entre les influences rap marquées de Ronnie Radke et le metalcore qui caractérise l’historique de Falling In Reverse. Le chanteur y pose ses conditions, explique son cheminement mental, s’ouvre à l’auditoire comme il l’écrirait dans son journal intime. Ce morceau est donc à prendre comme une introduction, en tous cas, c’est comme ça qu’on le perçoit au regard de certaines références très personnelles (que vous aurez si vous avez suivi ce qu’on vous a expliqué plus tôt) :
I admit I'm a little strange, I don't think that I'llever change
I survived a whole life of pain, you could say I escaped my fate
Ce titre se construit suivant un crescendo, montant en puissance à mesure que les mesures défilent, offrant un enchaînement parfaitement équilibré entre une partie rap et presque vindicative vers un metalcore soutenu d’une atmosphère terriblement prenante et intense. Somme toute, « Prequel » est une bonne entrée en matière, tant sur le fond que sur la forme.
Comme dit plus tôt, il est fort probable que vous ayez déjà entendu le titre suivant, à savoir, « Popular Monster ». Instant hit, ce morceau n’en demeure pas moins très personnel et s’aligne parfaitement avec les propos de « Prequel ». Une introspection doublée d’une confession, « Popular Monster » est puissant par les mots comme il l’est par son instrumentalisation. A l’image des influences de la formation, on navigue entre rap, dubstep et metalcore. Et le tout fonctionne parfaitement bien dans un morceau qui s’est imposé comme une véritable référence du genre.
Connaissez-vous le country metal ? C’est en tout cas comme ça qu’on qualifierait « All My Life ». La présence de Jelly Roll, countryman américain, n’y est certainement pas pour rien. Ce morceau est une véritable pépite, mariant la guitare classique à la puissance des basses, rendant presque funky des breaks bien cinglants, offrant une belle légèreté à un morceau qui aurait pu prendre un tout autre visage en restant dans la veine de ce que Falling In Reverse fait de mieux. Le mélange des genres est osé, démontrant encore une fois la capacité de la formation à s’aventurer hors des sentiers battus sans aucune appréhension. Côté paroles, on surfe toujours sur la vague des mauvaises décisions. Chose est certaine, ce titre n’en était pas une.
Comme pour nous rappeler à l’ordre, le prochain morceau est un concentré de pure violence. En même temps, avec Alex Terrible (Slaughter to Prevail) dans les parages, il ne fallait pas s’attendre à autre chose. Une seule règle dans ce titre : pousser à l’extrême tous les codes du metalcore, tant dans le rythme que dans la puissance. Hurlements bestiaux et autres breakdowns ponctuent un morceau éminemment autobiographique, à l’image de son intitulé : « Ronald ». Enfin, le rap n’étant jamais bien loin avec Falling In Reverse, c’est TechN9ne qui se colle à la construction d’un bridge qui est une vraie démonstration technique. Sérieusement, le débit de parole du gars est tout simplement impressionnant. Puisqu’on est pointilleux, on est quand même étonnés de voir deux acolytes accompagner Ronnie sur ce titre qui porte tout de même son propre nom.
Il y a des chances que vous ayez également déjà croisé « Voices In My Head » ces dernières années, ce titre étant sorti il y a deux ans. Avec « Popular Monster », ce titre forme l’ADN même de Falling In Reverse : inclusion de couplets rapés, refrains catchy, metalcore mélodique, un cocktail sans prise de risque mais qui fonctionne parfaitement.
« Bad Guys » est un morceau plutôt classique. Le petit twist qui le rend spécial est le fait que ce titre n’est qu’un déballage de tout ce que Ronnie Radke semble se reprocher :
'Cause I'm the bad guy, I'm a savage
I'm obsessive, I'm dramatic
I'm a loner, I'm an addict
I'm so goddamn problematic
I'm the bad guy, I'm a loser
I'm a psycho, believe the rumors
I got bad thoughts, I got bad vibes
I don't act right, it's nice to meet you
Et que sa propre compagne, Saraya, se joint à lui dans cette même litanie de reproches. Surprenant, non ?
« Watch the World Burn » est l’occasion de témoigner des multiples talents de Ronnie Radke. Il s’illustre dans des séquences de rap au débit totalement monstrueux. C’est une véritable prouesse qui force le respect, même auprès de ceux dont le rap n’est pas franchement un genre de prédilection (aka votre serviteur). Au-delà de cette admirable démonstration de force, « Watch The World Burn » semble assez banal, même si on apprécie le côté mystique insufflé aux phases de rap par une instrumentalisation travaillée. On accroche moins avec le refrain qui est trop speed relativement au reste du morceau. Ce changement de rythme semble s’imposer sans légitimité et casse la dynamique du titre.
« Trigger Warning » fait basculer Popular Monster dans une autre dimension. Le tempo est presque militaire, ce qui ferait sens au regard de ce titre qui est une véritable dénonciation des velléités militaires et de domination des Etats-Unis. On semble donc sortir de l’introspection de Ronnie Radke pour entrer dans une vision plus globale de la dénonciation. La présence du piano et de la trompette nous prend en tous cas complètement au dépourvu. Une référence aux fanfares américaines ? L’histoire ne le dit pas.
On poursuit le chemin de la dénonciation avec « Zombified » sorti il y a deux ans. On vous invite à aller regarder le clip de ce titre, il vaut le détour. C’est aussi par ce titre que l’on commence à toucher du doigt les capacités vocales exceptionnelles de Ronnie Radke, et qui ne sont pas assez mises en avant dans cet album à notre goût.
« No Fear » est peut-être le morceau qui se perd un peu dans cet album. Il se focalise sur le rap mais sent légèrement le déjà-vu au sein de Popular Monster.
On vous parlait, au tout début de cette chronique, des reprises proposées ces dernières années par Falling In Reverse. Popular Monster se clôt donc logiquement sur l’une d’elles, la reprise de la très célèbre « Last Resort » de Papa Roach. On est absolument ravis d’enfin retrouver Ronnie Radke dans cette proposition piano voix absolument saisissante qui permet enfin de prendre la mesure de tout le talent de cet artiste. On ne s’imaginait pas telle version d’un hymne des années 2010, mais maintenant qu’on y a gouté, impossible de se la sortir du crâne. C’est délicat, profond, terriblement poétique.
C’est l’heure du bilan. Popular Monster est une proposition qui s’est fait attendre, paraissant 7 ans après le dernier album de Falling In Reverse. Il est d’ailleurs assez perturbant d’y retrouver des titres qui ont fait leur propre chemin, il y a parfois plus de 4 ans. Alors qu’en dire ? C’est une réussite, sans aucun doute. C’est aussi le symbole d’une évolution artistique qui touchera n’importe qui suit les aventures de Ronnie Radke depuis les débuts. Sa raison d'être se situe-t-elle dans son rôle de journal intime, permettant à Ronnie d'exprimer toute sa colère et ses états d'âme ou bien dans son caractère exutoire permettant de régler des comptes avec ses détracteurs ? On ne peut décemment pas en être sûrs. Cependant, on déplore deux choses. Cet album est tout de même très égoïste. On comprend parfaitement le besoin de cet homme qui a vécu nombre de périodes sombres de se décharger à travers son art, mais de là à nommer un morceau de son propre nom et à afficher sa tête en pochette… On reste perplexes. On est aussi un peu déçus par la prédominance du rap quand on sait quel talent vocal habite cet homme. On aurait aimé plus d’envolées lyriques, de puissance vocale, d’intensité émotionnelle. Néanmoins, Popular Monster marque un tournant dans l’histoire de Falling In Reverse et nous laisse à penser que les prochains morceaux se dirigeront peut-être vers de nouveaux territoires jusqu’alors inexplorés.
Annaëlle Moss
Setlist :
- Prequel - 3:53
- Popular Monster- 3:40
- All My Life - 3:10
- Ronald - 3:16
- Voices In My Head - 3:11
- Bad Guy- 2:37
- Watch The World Burn - 3:23
- Trigger Warning - 2:22
- ZOMBIFIED - 3:38
- NO FEAR - 3:48
- Last Resort (Reimagined) - 4:43
Lineup :
- Ronnie Radke (chant, piano, guitare)
- Max Georgiev (guitare)
- Christian Thompson (guitare)
- Tyler Burgess (basse)
- Luke Holland (batterie)